Le Musée Cernuschi propose une exposition autour du mouvement : celui des trente-quatre artistes présentés qui se sont formés par leurs voyages, et celui de l’encre qui donne les magnifiques peintures à voir dans l’exposition. La plupart des œuvres sont issues des collections du Musée ; et certaines d’entre-elles sont si fragiles que l’exposition « L’encre en mouvement. Une histoire de la peinture chinoise au XXe siècle » est une occasion inédite et unique de pouvoir les admirer !
Artistes voyageurs, témoins exceptionnels du monde
Ainsi, l’exposition suit le fil des pérégrinations des artistes qui ont alimenté l’art chinois au long du XXe siècle, d’abord en Asie en empruntant les techniques des maîtres japonais. Ensuite, en redécouvrant leurs traditions comme Wu Zuoren (1908-1997) dont on peut admirer une époustouflante « Histoire du thé » et Zhang Bide (1921-1953) qui réinterprète les motifs de l’ancien site bouddhique de Dunhuang, redécouvert dans les années 1940 ; et plus tard, en essayant de s’adapter aux volontés picturales du régime tel que Wang Shenglie (1923-2003) ci-dessous. Aussi, on peut voir les idées soufflée par l’Europe où les peintres chinois se sont alors inspirés de la vie parisienne et des thématiques de l’art chrétien, comme La Piéta dont Lin Fengmian (1900-1991) fait une très belle réinterprétation au début du XXe siècle ; à la fin de ce même siècle, un vent Etats-Unien souffle sur la peinture chinoise et y apporte des références à la pop-culture comme les œuvres de Walasse Ting (Ding Xiogquan, 1928-2010) le montre.
Wang Shenglie (1923-2003). Esquisse pour « Huit femmes se jettent dans le fleuve », 1957.
Fusain sur papier. 46,5 x 98,5 cm. M.C. 2018-28. Donation de AXA, 2018. © Paris Musées / Musée Cernuschi
Pour n’entrer dans les détails que d’une seule artiste et vous laisser le plaisir de découvrir cette époustouflante et vraiment magnifique exposition, je ne vous parlerais en détail que du destin de Pan Yuliang (1895-1977) qui représente des femmes nues et dont les inspirations croisent l’art chinois et l’art français.
Orpheline, elle est vendue à une maison de prostitution mais parvient à devenir la première femme à intégrer l’école de peinture de Shanghai. Grâce à son talent et son travail, elle obtient une bourse qui lui permet de faire ses études en France et en Italie ; elle retourne en Chine en 1928 pour y faire une brillante carrière d’enseignante et devenir directrice du département de peinture occidentale à Shanghai Meizhuan. Elle repart définitivement en France en 1937. Laissant une œuvre aux multiples techniques tant elle était une artiste accomplie et dont vous pourrez admirer quelques encres en visitant l’exposition.
Pan Yuliang (1894-1977). Nu assis au peignoir rouge, 1955. Encre et couleurs sur papier. 91,6 x 64,8 cm.
M.C. 9699. Don de l’Ambassade de la République Populaire de Chine en France, 1981.
© Paris Musées / Musée Cernuschi. © Pan Yuliang
Mouvements des encres
Le mouvement des artistes à travers le monde est d’une importance capitale dans cette Histoire de l’art, si bellement représentée au Musée Cernuschi, mais c’est également le déplacement de l’encre sur le papier, tout un art qui se cultive dans la culture chinoise pour la calligraphie.
Ainsi, on peut lire au fil de l’exposition une histoire de la calligraphie chinoise : avec tout d’abord, les grand maîtres du début du XXe siècle comme Kang Youwei (1858-1927) et Wu Chagshuo (1844-1927). De plus, grâce à diverses vidéos qui ponctuent le parcours c’est la technique de la calligraphie même qui est mise au premier plan, grâce à de fabuleux et rapides documentaires montrant bien la précision et la maîtrises des traits et de l’encre. Le public peut alors découvrir les exigences et les traditions relatives à cette technique. Ensuite, en filigrane, ce sont les signatures et textes calligraphiés qui nous paraissent secondaires – à nous européens – sur les peintures qui racontent son histoire : sa place nouvelle ou son effacement des tableaux, jusqu’à bien évidemment sa métamorphose aux portes des années 2000 avec Lin Jin (1958) ou Yang Jiechang (1956) qui transposent la calligraphie et la peinture chinoise traditionnelles dans un champ contemporain.
Chang Dai-chien (Zhang Daqian) traçant les feuilles de lotus de l'avant-dernier
panneau de gauche (Les Lotus Géants, 1961). © Musée Cernuschi
Pour conclure, vous l’aurez compris c’est une exposition à voir ! Riche, puissante, avec des œuvres rares, intéressantes, extrêmement bien mises en scène et qui font voyager !
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L'encre en mouvement
Jusqu'au 5 mars 2023
Musée Cernuschi
7, avenue Velasquez,
75008 Paris
Du mardi au samedi
De 10h à 18h
Tarifs : entre 8 € et 10 €
Gratuit pour les moins de 18 ans
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